Hybridogenèse

Définition

L'hybridogenèse est une forme inhabituelle de reproduction que l'on trouve chez les hybrides entre différentes espèces. Il s'agit de la transmission sélective de l'un des génomes parentaux, tandis que l'autre est renouvelé par accouplement avec l'espèce correspondante. Elle est une forme de parthénogenèse, proche de la gynogenèse ou l'androgenèse.

Schéma de deux hybridogenèses :

(A) Hybridogenèse classique comme chez Poeciliopsis. Les hybridogènes sont des femelles hybrides F1. Ils s'accouplent avec les mâles de leur ancêtre paternel et transmettent par clonage le génome de leur ancêtre maternel tout en rejetant tous les chromosomes hérités paternellement. (B) Hybridogenèse sociale. Les reines sont produites soit par parthénogenèse (par exemple dans le genre Cataglyphis), soit à partir d'accouplements intra-lignés (ligne pointillée, par exemple dans le genre Pogonomyrmex). Les ouvrières sont toujours produites à partir de croisements hybrides entre des lignées génétiquement divergentes.

Explications

L'hybridogenèse est considérée comme une forme de parasitisme sexuel, dans lequel le génome hybridogénétique acquiert un double avantage de transmission et exploite l'effort de reproduction d'une autre espèce.

⭐ Voir aussi le principe du klepton et de la kleptogenèse.

L'hybridogenèse a été découverte à la fin des années 1950 par Robert R. Miller et R. Jack Schultz chez de petits poissons du genre Poeciliopsis (proche des guppys) des cours d'eau du nord-ouest du Mexique. Ces poissons ont attiré l'attention parce que des populations entières se composaient uniquement de femelles, sans mâles apparemment. En l'absence de mâles conspécifiques, les femelles se sont accouplées avec des mâles d'une espèce sexuée co-occurrente (Poeciliopsis lucida) pour se reproduire.

Une décennie plus tard, l'énigme de la stratégie de reproduction de ces poissons entièrement femelles était résolue. Les chercheurs ont découvert que les femelles étaient le résultat d'un ancien événement d'hybridation entre P. lucida et une deuxième espèce étroitement apparentée, Poeciliopsis monacha. Même si elles s'accouplent systématiquement avec les mâles de P. lucida, ce qui devrait conduire à un génome largement ressemblant à lucida, le génome des femelles ressemble à celui d'un hybride de première génération entre les deux espèces. La composition hybride est maintenue car les femelles ne transmettent leur génome maternel de P. monacha qu'à leurs oeufs, rejetant tous les chromosomes de P. lucida dans le processus. Dans la progéniture, la configuration hybride F1 persiste, car les oeufs sont fécondés via des accouplements avec des mâles P. lucida.

Les mâles de P. lucida ne tirent aucun avantage de l'accouplement avec des femelles hybrides, car leur génome sera éliminé dans les oeufs de leur fille et ne contribuera pas aux générations futures. En conséquence, les femelles hybrides sont souvent considérées comme des parasites sexuels qui exploitent l'effort de reproduction de leur hôte sexuel. Le terme hybridogenèse a été inventé par Schultz en 1969 pour décrire ce nouveau mode de reproduction. Elle est aussi communément appelée "reproduction hémiclonale", pour refléter le fait que la moitié du génome - dans notre exemple, celui de la mère P. monacha - est transmise par clonage entre les générations, tandis que l'autre moitié - celle de la génitrice P. lucida - est remplacé à chaque génération.

Le terme "hybridogenèse" a parfois été utilisé pour décrire la génération de nouvelles espèces par hybridation. Nous nous concentrons ici sur le sens originel de l'hybridogenèse.

Depuis sa première découverte chez Poeciliopsis, l'hybridogenèse a été trouvée dans une gamme variée d'animaux, y compris d'autres poissons, des grenouilles, des phasmes et des fourmis. La reproduction chez beaucoup de ces espèces est similaire à la situation chez Poeciliopsis : les femelles hybrides transmettent par clonage leur génome maternel et fécondent leurs oeufs via des accouplements avec des mâles de leur ancêtre paternel. Cependant, chez certaines espèces, notamment les poissons Hypseleotris et les grenouilles de piscine Pelophylax, la transmission du génome hémiclonal existe aussi bien chez les mâles que chez les femelles.

Chez les fourmis, l'hybridogenèse, appelée "hybridogenèse sociale", varie selon les espèces et diffère de la forme décrite à l'origine. Il existe trois types d'hybridogenèse sociale. Dans le premier type, trouvé chez Cataglyphis hispanica, deux lignées génétiquement distinctes coexistent. Toutes deux produisent de nouvelles reines par parthénogenèse, des mâles à partir d'oeufs non fécondés (comme c'est généralement le cas chez les fourmis), tandis que des ouvrières sont produites par hybridation entre les deux lignées. Bien qu'il n'y ait pas d'élimination du génome dans ce cas, le résultat est similaire à l'hybridogenèse classique : le génome maternel est toujours transmis à la génération suivante, tandis que le paternel n'est transmis qu'aux ouvrières stériles (le "soma" de la colonie) et ne contribue donc pas aux générations futures.

En rapport avec "hybridogenèse"

• klepton

  

  Un klepton (kl.) est une espèce qui nécessite l'apport d'un autre taxon biologique pour terminer son cycle de reproduction avec une hybridogenèse...

• androgenèse

  

  L'androgenèse est la production d'une descendance androgène qui n'a que le génome paternel.

• gynogenèse

  

  La gynogenèse est un processus de développement d'ovules sans contribution génétique paternelle.

• parthénogenèse

  

  La parthénogenèse désigne la capacité d'un organisme femelle, qu'il soit animal ou végétal, à se reproduire de manière autonome, sans intervention d'un...